Vendre aux clients pauvres en 3 points


Le pitch d’Amazon : « Ce livre montre que "faire affaire" avec des populations pauvres peut être bénéfique pour tous lorsque la démarche est bien adaptée aux contraintes et besoins de chacun »


Ce que j’en attendais : une belle analyse du « comment ils ont fait pour s’adapter à cette cible de pauvres ?» (parce que derrière, il y a un « repensage » radical des business model de maximisation des marges et du modèle consumérisme actuel !!!) et je suis servi.


Il est écrit par quelqu’un qui travaille dans ce secteur, Henri de Reboul, qui dirige IMS Entreprendre . IMS Entreprendre aide, en gros, les entreprises dans leur volonté d’être responsable socialement.
D’avance, je savais que ce serai un ouvrage d’évangélisation, qui ne va jamais remettre en cause les initiatives des entreprises.

Je vous invite à le lire si ça vous intéresse (surtout les pages 146, 150 et 151).
Mes remarques sont signalées par ce ce signe "=>"


1-  Un ROI différent


Social business : business  ayant  des KPI sociaux : formation de la population, emplois directs, indirects, santé, pouvoir d’achat, malnutrition, etc. ça dépend du produit.


Autres atouts du Social business :

- intérêt RH interne : fierté que ça boite fasse ça => amour pour sa boite,
- garder les talents qui ont une fibre « solidaire »,
- image locale améliorée et image sur les marchés développés améliorée également.
- « Apprendre à vendre aux clients pas uniquement riches c’est  se protéger contre les crises »
- Espérance que petit a petit, les clients BoP (Bottom of the Pyramid) deviendront des clients « normaux »



Business à envisager sur le long terme, le temps que tout se rode, se solidifie, loin de la logique de la rentabilité au quarter classique.
Ce type de projet est mis en R&D; dans certains cas à cause de cela.


Projet de vente de yaourts à bas prix au Bangladesh par Danone : 99% des profits de Danone sur ce projet sont réinvestis. 1% va symboliquement à Danone et Graamen (partenaire local, vous savez l’entreprise de micro-crédit de Muhammad Yunnus).


=> du bon sens finalement, le « slow business » qui laisse le temps aux choses de se mettre en place, qui impose une certaine efficacité mais pas de chiffres de business inhumains, qui ne pousse pas à bout ses acteurs et réinvestis les bénéfices dans la structure, et du coup, moins dans des bonus / dividendes, etc…


Attention, sans implication des autorités locales, des  NGO, de l’Etat, de la population, les projets sont difficiles à mener.
Parfois pour des questions de rentabilité pure des opérations, mais surtout pour la nécessité de former, sensibiliser, informer, mobiliser la population, que l’entreprise ne prend pas en charge.


=> L’entreprise reste une entreprise, elle cherche un business model pérenne (qui peut aussi marcher même si les caisses de l’Etat du pays pauvre sont à sec), même si là, elle ne cherche pas deux chiffres de croissance annuel.

Ce n’est pas du bénévolat, de l’humanitaire, ou une béquille aux lacunes des pays visés.


2- Simplifier / Réhumaniser l'entreprise et la relation entreprise /client


Dans les projets évoqués dans le livre, les contrats sont simplifiés à l’extrême (les contrats d’assurance), « plus de lignes en caractère 8 » et de conditions de non prise en charge par l’assurance (AXA), on va vers plus honnêteté, plus de transparence, « il ne s’agit pas de vendre un produit qui ne sert à rien » (Danone)


=> Difficile « d’arnaquer » les pauvres, le dirais, pour caricaturer un peu.
Difficile de prendre les marges et d’appliquer les filouteries faites aux clients des pays développés, ce serait déstabiliser finalement les populations visées, c’est pas l’objectif, nous sommes quand même humains, et c’est pas bon pour l’image.

Intéressant d’entendre qqun d’Axa reconnaitre qu’ils ne mettront pas de conditions contractuelles en caractère 8 par honnêteté (parce que dans mon contrat, il y en a plein des lignes en caractère 8 bande de petits malins).
Intéressant de lire qqun de Danone dire qu’ils ne vendront pas de produits qui ne servent à rien (parce qu’en France, ça y va les produits qui servent à rien, allé j’en cite un Danone Essensis, le yaourt qui rend beau)
Au final, traiter avec les pauvres semble rendre plus humain et plein de bon sens !


Dans le projet de Danone : Les unités de production sont locales, pour desservir le voisinage, et ultra efficaces avec un max de main d’œuvre locale, volontairement peu d’outils « modernes », une dépense énergétique optimisée au max (consommation limitée, réutilisation de l’eau, panneaux solaires). La distribution sur le « dernier km » est en partie faite par des femmes « du cru ».
Résultat, les yaourts sont produits pour presque rien, distribués pour pas grand-chose, et ça passe pour le marché des gens vivant avec -2$ par jour.


=> L’homme reprend la place de la machine, au centre de la production, l’unité de production redevient à taille humaine, le circuit court redevient la norme, on vend dans une sphère locale, humaine… (ca me fait penser à un de mon billet sur le miracle de la main d’œuvre pas cher qui « réhumanise le monde » )


=> J’ai été scié que les entreprises citées dans le livre aient trouvé des moyens de réduire leurs prix massivement (Essilor par exemple fournit des lunettes pour le même nombre de jours de travail en France qu’an Bangladesh, 5 en moyenne, je vous laisse imaginer  le différentiel et une entreprise du médicament vend ses produits à 20% de leurs prix normaux).

Ca veut dire quoi ?
- Les entreprise multinationales optimisent mal leurs process de production quand c’est pas pour des marchés pauvre, d’où nos prix élevés, bof
- Elles margent très très fort dans l’absolu, mais si vraiment il faut, elles peuvent sortir des produits pour des sommes dérisoires, sans gagner de quoi offrir un Golden parachute à tout board et un séminaire aux Maldives au Conseil d’administration, mais sans être en slip non plus, plausible !
J’insiste pas sur ce point car le livre i
nsiste pas dessus (et il a bien raison !!), mais quand même, on peut s’intéresser à a capacité des industriels à produire et vendre « pour beaucoup moins », quand, en France, ils pratiquent des prix plutôt forts et à la hausse, alors même qu’ils produisent toujours plus grâce aux pays émergents, avec les économies d’échelle à la clé, et que grâce à la magique mondialisation, ils font produire dans justement dans les pays pauvres qu’ils viennent aider … (bon je m’arrête là, ça peux durer longtemps ! )


3- La clé de voute communautaire


La distribution, surtout le dernier km, coute très cher, c’est un facteur de coût clé. Pour aller toucher les clients pauvres, les entreprises mutualisent leurs moyens de distribution (alliance entre vendeurs de micro-crédit avec des vendeurs de micro-assurance par exemple).
Elles trouvent aussi des moyens de commercialisation « à distance » originaux via mobile ou internet (après, limite du taux d’équipement et de la maitrise de l’usage…)

Elles impliquent également les acteurs publics locaux (maires, Etat…), NGO, habitants (chargés commercialiser et de distribuer les yaourts de Danone) : principe de partenariat « public privé participatif ». (voir le tableau du livre p146). Les habitants sont consultés, impliqués, consultés, gèrent la distribution et achètent.
Dans le projet de vente de yaourt au Bangladesh de Danone, Graamen, par son tissu et sa capacité à mobiliser la communauté, a été incontournable. Des grands groupes comme Danone, n’ont en effet pas le tissu et la proximité nécessaire avec les « locaux ».


=> Ca m’a fait immédiatement penser au web 2.0 (sans web hihi).
Tous les acteurs en présence sont  impliqués, mobilisés, la dynamique de la communauté et la clé. Pas de marketing, pas de matraquage publicitaire. On fait des produits dont les clients ont besoin ou qui peuvent répondre à des besoins et attentes qu’ils ont. C’est du pure « bottom-up ».
Des clients pas pauvres n’apprécieraient ils pas d’être écoutés, impliqués, d’être proche des marques ? Bien sur que si !!!! Moi je veux :)


Voilà, fin de cette petite fiche de lecture. Merci aux courageux qui ont tout lu. J'espère que ça vous a plu.


A vous maintenant ;)